Ne plus comprendre la langue de l'autre... |
C’est une idée
vieille comme… comme les réformes de l’enseignement. A chaque fois, on jette un
nouvel apprentissage de langues à la trappe. A chaque fois, on nous explique
que pour rendre l’enseignement plus démocratique, moins élitiste, il faut se
concentrer sur le plus important, et aujourd’hui l’important, c’est l’anglais.
La dernière
trouvaille: Supprimer les classes bilingues, notamment allemand. Et c’est vrai:
Apprendre l’allemand ne sert à rien.
Cela ne sert à
rien pour passer sa commande de double cheese, de nuggets, de burger; de
hamburger. Il paraît qu’à Hambourg, ils en sont tout retournés. ( Burger-Hamburger: Ceci est de l’humour, de
l’humour germaniste ! )
L’allemand ne
sert à rien: Il vaut bien mieux baragouiner deux mots d’anglais: C’est le vrai
kit de survie qui vous permet de vous débrouiller partout dans le monde, du
Brésil jusqu’en Chine. Même en Allemagne d’ailleurs. « Are you talking to me ? « (Ceci est encore de l’humour, re-LOL !)
Il y a
longtemps, mais qui s’en souvient encore,
on faisait « français – latin – grec », c’était la voie royale.
Pour dire de quelqu’un qu’il assurait dans ces études, on disait qu’il était
« fort en thème ». Et cela voulait dire en thème latin (ou en version
grecque). Mais c’était difficile et puis, c’étaient des « langues mortes ». Elles sont
passées à la trappe, et il est sûr que cela a été extrêmement efficace pour
hausser le niveau de l’apprentissage des langues dans notre système éducatif.
Il suffit d’entendre des français parler anglais pour mesurer le chemin
parcouru depuis Maurice Chevalier. (Ceci
est encore de l’humour, re-LOL !)
Qu’importe que
ces deux langues soient des langues de culture, qui nous apprennent d’où nous
venons, d’où viennent nos mots de tous les jours, d’où viennent les valeurs de
nos sociétés, les grands mythes qui ont structuré notre imaginaire avant
qu’Hollywood à la sauce Peplum ou Disney ne nous reformate. Aujourd’hui, nous
connaissons mieux les intrigues compliquées du Seigneur des Anneaux ou la
filiation encore plus compliquée de Dark Vador, que les pérégrinations d’Ulysse
en Méditerranée. Et nous ne sommes plus capables de comprendre les inscriptions
aux frontons de tant d’églises, d’horloges, de châteaux. Mais qu’importe !
L’allemand, ça
ne sert à rien: L’allemand est seulement la langue maternelle la plus parlée en
Europe. L’Allemagne est simplement notre principal partenaire, peu de pays au
monde ne sont autant liés pour le pire et le meilleur que nos deux pays. Pourtant,
jamais l’allemand n’a été , chez nous, aussi peu étudié. Qu’importe: Les
allemands eux apprennent notre langue, même si la tendance est à la baisse Ils
viennent d’ailleurs étudier à l’ENA ou à Sciences Po, ce qui permet à la
Chancellerie allemande, ou aux grandes entreprises allemandes de bien mieux nous
connaître que nous ne les connaissons. Car apprendre une langue, c’est
comprendre comment raisonne son interlocuteur.
Et puis, ne
nous cachons pas derrière notre petit doigt, l’allemand chez nous a mauvaise
réputation :
Ce serait une
langue difficile… Comme si le chinois, le russe, l’arabe ou le hongrois
s’apprenaient les doigts dans le nez. Et même l’anglais, si on veut vraiment
l’apprendre, au-delà de quelques répliques comme « Fuck, fuck, fuck »
L’allemand,
c’est moche, c’est guttural; Cela fait 70 ans que nous en sommes restés aux « Raus, schnell, Gestapo ». Hollande
et Merkel ont beau se faire des câlins, cela n’y change rien. C’est à se
demander comment les plus grands musiciens ont composé en allemand, qui était
considérée comme LA langue de l’Opéra et des « Lieder ». C’est à se
demander pourquoi avant guerre, il n’y avait pas d’intellectuels, d’écrivains,
d’hommes politiques français, qui n’aient étudié l’allemand. Aujourd’hui, qui serait capable d’aller
comme De Gaulle en 1962 s’adresser en allemand au peuple allemand ?
Une langue
gutturale ? Et pourquoi ne le dit-on pas de l’espagnol, avec son j, sa
« jota » ?
Langue
brutale ? « Raus, Gestapo ? ». Je me demande si le français
des militaires pendant la guerre d’Algérie était doux aux oreilles des
indépendantistes arrêtés ou torturés.
Supprimons
l’allemand, supprimons les classes bilingues, les filières péniblement créées
depuis 50 ans d’amitié franco-allemande, d’Office franco-allemand de la
Jeunesse. Comme si c’est cela qui
freinait l’apprentissage de l’anglais par tous. Alors que l’on sait que plus on
apprend de langues, plus on a des facilités à en apprendre de nouvelles.
Et puis,
cultivons les clichés. Réduisons les allemands aux seuls bavarois :
culottes de peau, femmes en dirndle, musique tyrolienne (oui on mélange tout),
et fête de la bière !
Comment aimer
ce que l’on ne connaît pas ? Nous ne connaissons plus l’Allemagne, alors
comment construire un avenir commun ?
Nous
n’arrêtons pas de déplorer que notre société soit déboussolée et au même
moment, nous nous coupons de nos voisins, de nos racines. Cela au nom de
l’accès du plus grand nombre à la culture. Selon un principe qui
est : « Qui peut le moins,
peut le moins ».
Je me souviens
d’échanges avec Jacqueline de Romilly, une spécialiste du grec ancien qui vous
faisait vivre Thucydide, comme si
vous étiez à Athènes au temps de Périclès, c'est-à-dire bien avant Alexis Tsipras. Hollywood n'existait même pas, c'est dire !
A 90 ans, elle continuait d’expliquer la
modernité de la Grèce antique à des lycéens « de banlieues » et comme on dit : Elle les scotchait
avec Aristophane,
Eschyle, Euripide ou Homère ! Elle leur apprenait que ce dernier
n’était pas un héros des Simpsons, mais le premier « slammeur » européen ! (Ceci est encore de l’humour, re-re-LOL !)
Comme quoi, ce
n’est peut-être pas la matière enseignée qui est en cause mais bien la qualité
du pédagogue.
Pédagogue, pas pédéraste, ni pédophile. Tiens voilà encore un
exemple, où avoir quelques notions des racines des mots de notre langue,
éviterait bien des confusions et des raccourcis.
Pour me
consoler, je vais revoir « Der
Himmel über Berlin » de Wim Wenders « Le ciel au-dessus de Berlin », traduit en français
curieusement par les « Les ailes du désir » et qui
commence par la chanson de l’enfance de Peter Handke : « Als
das Kind Kind war, wußte es nicht, daß es Kind war … ».
Quand l’enfant était un enfant, il ne savait pas qu’il était enfant : Un
poème sur l’innocence de l’enfant, sur l’innocence perdue.
Finalement,
quelle chance d’avoir appris cette langue inutile !
Nous vivons un
e-poque formidable.
1 commentaire:
Merci pour tes éloges à la langue allemande, Pierre
L allemand maîtrisé !!...même en disparation en Allemagne...
Parler l allemand en Allemagne d aujourd hui ne veut pas dire -- la maîtriser..
Même à la téle allemande et dans des émissions de caractère plutôt sérieux on entend de plus en plus des fautes graves comme:
...' kleiner/ grösser/besser WIE - au lieu de ALS (Steigerung anstatt Vergleich); ou 'einzig-ste' au lieu de 'einzig'. (einzig/unique ist nicht steigerbar, unique est unique -est n est pas gradable etc..)
etc, etc..
http://www.huffingtonpost.de/2014/10/14/gaengige-deutsche-sprachfehler_n_5982688.html
http://hypermedia.ids-mannheim.de/call/public/fragen.ansicht?v_id=134
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