Il vaut mieux fermer sa gueule et passer pour un con plutôt que de l'ouvrir et ne laisser aucun doute à ce sujet |
Avec l’arrestation de l’organisateur présumé des attentats
du 13 novembre dernier à Paris, les médias moulinent pour commenter
et expliquer les événements. Comme il y a moins de choses à dire et surtout à
montrer que ce que l’aspirateur de l’information permanente exige, ce sont les
mêmes images montées en boucle, ce sont les mêmes experts, eux aussi montés en
boucle. On découvre que c’est dingue, le nombre d’ « experts »
police-justice que nous possédons et nous ne le savions pas. Compliqué de
savoir ce que valent l’expérience et la légitimité de tel ancien directeur des
renseignements, de tel expert auprès de telle instance. A la longue, difficile
également pour tous ces experts, mais aussi ces politiques sommés de réagir en permanence,
ces artistes qui doivent avoir une opinion sur tout, et enfin pour les
journalistes, de ne pas se mettre à parler pour ne rien dire et de finir par déraper.
Tous ces mots qui à force de répétition prennent une signification qu’ils
n’avaient pas au départ : La « traque » , le « loup
solitaire », le « radicalisé », « exfiltrer », ou dans
d’autres domaines, « finaliser » un dossier, ou encore « se
projeter dans une maison à acheter », ça c’est l’effet Stéphane Plaza sur
M6.
Et puis il y a les fameuses « victimes innocentes ». Victimes innocentes ? Qu’est-ce à
dire ? Y aurait-il des victimes non innocentes ? Le pire est quand
l’on rajoute « jeunes et
innocentes ». En quoi le fait d’être assassiné à 30 ans est-il pire
qu’à 50 ans ?
Cela fait penser à l’expression horriblement malheureuse de
l’ancien Premier Ministre Raymond Barre devant la synagogue de la rue Copernic
devant laquelle une bombe avait explosé en octobre 1980, qui avait frappé des « français innocents ». En fait il
s’agissait de passants, tués ou blessés parce qu’ils passaient devant la
synagogue. Les juifs qui se trouvaient à l’intérieur avaient échappé à la
bombe. Raymond Barre n’était pas antisémite, mais pressé par les médias, il
avait sorti la petite phrase de trop. Et aujourd’hui, encore plus qu’en 1980,
l’on comprend que dans ce genre de drame, chaque mot compte. On comprend
qu’avec internet et le flux permanent d’informations, on a besoin plus que
jamais, des journalistes et de leur métier : Vérifier les sources
d’informations, recouper les informations, les hiérarchiser, les mettre en
perspective, les « formater » dans des messages simples mais pas
simplistes, de plus en plus courts, donc où chaque mot doit être pesé. Et
parfois devant la logorrhée des médias, l’on se demande: Y-a-t-il un rédacteur
en chef dans le cockpit de l’info, ou bien nos confrères ne sont-ils là que
pour avoir un bâton de maréchal, un titre et le salaire qui va avec, en
laissant présentatrices et présentateurs dire et surtout répéter autant de
bêtises à l’antenne, en « direct-live » ? Arrive un moment où
parce que cela a été dit à la télé, cela devient réalité. « Cela doit être
vrai, je l’ai vu à la télé »! On disait autrefois qu’il fallait tourner sa
langue 7 fois dans sa bouche avant de parler. Ce conseil de bon sens devrait
être suivi plus souvent par les médias d’aujourd’hui. Et comme disait Coluche: Il vaut mieux fermer sa gueule et passer pour un con plutôt que de l'ouvrir et ne laisser aucun doute à ce sujet.
Nous vivons une e-poque formidable.
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