Paperblog

jeudi 4 décembre 2014

Booba-Kaaris: Faut-il être macho et homophobe pour être rappeur?


C’est un genre qu’ils se donnent: Sans doute pour faire du « buzz », les rappeurs se « clashent » sur internet. Oh! Rien de très nouveau: On est dans le registre : J’en ai un plus grosse que toi. Je pisse plus loin que toi ! Viens-là si t’es un homme. T’as pas les couilles de le faire, etc.… et les « followers » de tous ces rappeurs de compter les points (les poings ?).
Un des ressorts de la création dans le rap est la  « battle », la bataille entre deux chanteurs, deux bandes qui s’affrontent par leurs textes, où les coups de poings sont remplacés par des coups de rimes plus ou moins inspirées. Ca donne parfois, n’en déplaise à l’inculte Eric Zemmour, des créations incroyables, des jeux avec les textes d’une grande richesse. Les maîtres en ce domaine, les rappeurs américains, ont parfois des phrases d’une telle complexité qu’il ne suffit pas de (bien) parler l’anglais pour comprendre toutes les allusions et les références. Comme Kaynee West par exemple, qui même s’il a un peu pété les plombs aujourd’hui, est un créateur inspiré et cultivé. Comme lorsqu’il chante » I see blood on the leaves », « je vois du sang couler sur les feuilles des arbres », il fait référence au Ku Klux Klan qui pendait des noirs sur des arbres à l’entrée des villages et à la chanson de Nina Simone, en 1965 : « De bien étranges fruits ». Ou lorsqu’il parle de sa mère qui lavait des vêtements qu’elle ne pouvait porter car ils étaient pour les blancs. Ou encore lorsqu’il rappelle «  My momma was raised in a era when, clean water was only served to the fairer skin », qu’elle n’avait pas le droit de boire de l’eau pure, qui, jusque dans les années 1960, dans certains Etats du Sud,  était réservée aux blancs[1].
Mais beaucoup d’autres textes sont plus « bourrins », genre : » J’en ai une grosse » et quand aux femmes, c’est toujours : «Je sors avec ma pute », etc…
Le problème n’est pas la grossièreté. Après tout, « Fernande » de Brassens, le « Zizi » de Perret, etc.… appellent un chat un chat. On peu citer encore Arthur Rimbaud, et son fameux « Sonnet du trou du cul » : « Obscur et froncé comme un œillet violet. Il respire, humblement tapi parmi la mousse. Humide encor d'amour qui suit la fuite douce »
Le problème est lorsqu’il ne reste que cela. « Se tenir en permanence les couilles en chantant « wesh, wesh », en multipliant les insultes, parfois les appels au meurtre, comme donc, depuis quelques jours entre les 2 rappeurs : « Je boirais ton sang » dit Kaaris à son ancien pote Booba, et il continue, très subtil : «  Continue à ouvrir ton cul, espèce de salope! Il va être tellement large, tu vas voir ce que je vais rentrer dedans! Ton clavier, ton ordi, tes jouets pour enfants, ta poussette, tout! Je vais te briser en deux, putain«. Pourquoi cette obsession de la sodomie ? Pourquoi les filles sont toutes des putes ?
Au lieu de s’inquiéter du formatage garçons en bleu – filles en rose, à l’école, nos dirigeants feraient mieux de s’attaquer au machisme et aux préjugés, là où ils sont : Car ces clashs ont plus d’influence sur les « djeuns » que n’importe quelle déclaration de Najat Vallaud-Belkacem.
Le combat, il est dans les locaux poubelles, là où en 2012, Sohane fût brûlée vive, à Vitry-sur-Seine, parce qu’elle était quoi ?  Une « bitch », une pute ? , Non une jeune fille de notre temps. Les clashs entre Booba, Kaaris and co sont donc  loin d’être anecdotiques.
Nous vivons une e-poque formidable.

Heureusement, il y en a qui ont de l’humour, comme Waly Dia dans cette parodie





[1] « Black Skinhead » et « New slaves »

Aucun commentaire:

Archives du blog