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dimanche 16 janvier 2011

Heureux comme Dieu en France ?


Inauguration de la Grande Mosquée de Paris en 1926. Au deuxième plan, Gaston Doumergue

« Glüklich wie Gott in Frankreich ». C’est une expression, flatteuse pour notre pays, qui a encore cours en Allemagne et dans beaucoup de pays européens. Elle met en avant ces qualités géographiques, climatiques, naturelles de la France, notre art de vivre, notre culture. Mais à l’origine cette expression était celle des juifs d’Europe centrale qui enviaient la situation de leurs coreligionnaires dans notre pays. Et évidemment la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la pleine citoyenneté reconnue aux juifs, qui est d’ailleurs allée de pair avec la première abolition de l’esclavage par la constituante de 1793, y sont pour beaucoup. Et l’on sait que l’un des déclics qui a poussé Théodore Herzl a s’engager sur la voie du sionisme et de l’idée de la création d’un foyer juif et fine de la création d’Israel, a été le procès Dreyfus, sa consternation devant la montée de l’antisémitisme en France, dans cette troisième République où les valeurs laïques semblaient prémunir contre de tels sentiments.
Face à l’Islam, nous nous trouvons dans la même situation, devant le même dilemme.
Ou bien nous considérons que notre modèle de société construit par nos ancêtres depuis plusieurs centaines d’années ne peut plus fonctionner. Et alors, la seule voie qui nous reste est celle du communautarisme.
Ou bien nous trouvons les mêmes réponses mais adaptées à notre temps, que nous avions su trouver en 1793, ou en 1905, avec la loi de séparation entre l’Eglise (catholique essentiellement) et l’Etat.
L’intégrisme musulman ne serait pas soluble dans la République ? Allons donc ! C’est vraiment manquer de foi, littéralement, dans ce qui nous a permis jusqu’à présent de construire un modèle qui a fait dire aux autres européens que même « Dieu était heureux en France » ! En revanche, comment peut-on stigmatiser la prière des musulmans sur les trottoirs de certains quartiers de nos villes, alors que nous sommes toujours en train de nous demander si aider au financement de mosquées n’est pas une atteinte à la loi de 1905. « La construction d’une mosquée(…) correspond trop bien à la politique que la France se doit à elle-même de suivre envers ses fils musulmans, et qui doit se traduire tantôt en actes d'équité politique ou administrative et tantôt en gestes de sympathie ou de bienveillance » Qui écrit cela ? Le journaliste Paul Bourdarie en 1906. Il sera un des initiateurs du projet de la construction de la grande Mosquée de Paris, soutenue par le Maréchal Lyautey, et qui sera inaugurée en 1926 par le Président de la République Gaston Doumergue.
Et la Mosquée de Lyon ? A-t-on oublié que sa construction doit beaucoup à Michel Noir, maire de droite, qui dut batailler contre une partie de son électorat et des soit disant « associations d’habitants », en fait manipulées par le Front National, pour accélérer l’obtention d’un terrain, le permis de construire, le financement, jusqu’à l’inauguration en 1994. Remarquons qu’aussi bien les alentours de la Mosquée de Paris ou de la Mosquée de Lyon sont devenus des lieux de vie plutôt recherchés, voire tendance, et non des zones de non-droit ! Michel Noir avait une expression : « Il vaut mieux perdre une élection que perdre son âme ! ». Et comme l’on sait, il ne perdit pas les élections …
C’est cette voie qu’il faudrait choisir, non seulement au niveau local, mais également national, pour ne pas céder aux sirènes de celles et ceux qui affirment : « L’Islam est notre malheur » et qui n’est que l’écho d’une autre phrase allemande « Die Juden sind unser Unglück » «Les juifs sont responsables de nos malheurs », le slogan des nazis qui a conduit à l’holocauste… Pour que comme les juifs d’Allemagne et d’Europe centrale il y a deux cents ans, les musulmans de demain puissent dire partout dans le monde : « Heureux comme Dieu en France ! ».
Nous vivons une e-poque formidable.


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