Cela devait être en première année d’HEC. Dans un cours où il devait être question de gestion de P.M.E. Et où il fallait rendre un mémoire sur un cas « concret ». La matière ne m’excitait guère, et donc, assez habilement (LOL !), j’avais choisi « Financement du développement des PME : l’exemple des restaurants 3 étoiles ».
Avec un contact facile avec Vrinat du restaurant Taillevent ( parce que lui-même ancien HEC ), j’ai tout de suite pensé à Paul Bocuse. Même si à Lyon, pour ses proches, pour ses amis, c’était « Le Paul », il était déjà une star… alors allait-il recevoir un petit étudiant qui venait l’embêter avec des questions sur le management de son restaurant et tout cela pour un mémoire ?
Et pourtant… j’ai très vite et très facilement obtenu un rendez-vous.
Je ne me souviens plus de ce que j’ai pu écrire dans mon mémoire, mais du rendez-vous avec Bocuse, ça oui !
C’était un samedi en début d’après-midi. Le restaurant commençait à se vider. Bocuse est venu lui-même me saluer, énorme, imposant, poignée de main franche, regard direct. Il m’a fait asseoir à une table dans un coin, s’est éclipsé quelques minutes, avant de revenir avec un grand sourire et en s’excusant « Je réglais deux ou trois choses en cuisine ». Et il s’est mis à table, littéralement. « Tu as déjeuné ? » me demande-t-il. J’ai honte, mais j’ai été obligé de mentir parce que, bêtement, j’avais déjeuné ! Mais quand Bocuse vous demande si on a faim, que peut-on répondre d’autre que « non, je n’ai pas déjeuné ». Et là… « Tu aimes la soupe aux truffes ? » Est-il possible de dire non... Il hèle un serveur, il passe commande pour moi, et le plat, et les amuse-gueules, et les fromages, et les desserts, on s’active autour de nous, aujourd’hui encore je garde une impression de chaleur, de soleil, et pourtant on devait être en hiver, c’était étourdissant. Et en plus, il était passionnant, parce que, mine de rien, mon sujet l’intéressait. C’était juste avant l’explosion du business 3 étoiles et il commençait à bâtir ce qui est aujourd’hui un empire. Donc la gestion d’une PME comme la sienne, évidemment qu’il y prêtait autant attention qu’à ses cuisines. Avec son restaurant, ses brasseries, ses produits dérivés, mais surtout cette intuition de tous les nouveaux développements qu’offre notre époque, les compétitions des Bocuse d’or, l’Institut Paul Bocuse, et les masters de management des arts culinaires, développés avec l’Université de Lyon et qui font des petits jusqu’en Chine, Bocuse est aujourd’hui mondial, tout en gardant les pieds sur terre, sur sa terre natale de Collonges. Et c’est évidemment en me présentant sa fierté, son limonaire qu’il venait de faire restaurer, et qui lui rappelait ses parents, restaurateurs à Collonges eux-aussi, que s’est achevée notre rencontre.
A la fois grand chef, à la mode du siècle dernier, comme un Fernand Point ou une mère Brazier, Paul Bocuse est aussi un précurseur, le père de tous les stars de la gastronomie d'aujourd'hui.
A la fois grand chef, à la mode du siècle dernier, comme un Fernand Point ou une mère Brazier, Paul Bocuse est aussi un précurseur, le père de tous les stars de la gastronomie d'aujourd'hui.
Un empereur, voilà ce qu’est Bocuse
Nous vivons une e-poque formidable.
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