Heureusement que nous avons la
touche « zapping » sur nos télécommandes. Cela nous permet d’éviter
l’accident vasculo-cérébral en tombant sur des émissions ridicules. Le ridicule
peut tuer.
Sans doute parce que cela figure
dans le cahier des charges du service public, on nous a donc infligé une
reconstitution historique d’un des grands moments de l’histoire du combat pour
les libertés et l’égalité dans le monde, la révolte des esclaves de
Saint-Domingue, l’indépendance d’Haïti, «première République
noire », autour d’une figure historique considérable celle de Toussaint-Louverture.
Sur le principe, l’intention est
louable. Mais le chemin qui mène à l’enfer est pavé de bonnes intentions. Et en
l’occurrence, la folklorisation de cette page d’histoire était d’un grotesque
fini. La folklorisation ("doudou-isation") mène à la dévalorisation, au racisme; La palme revenait à la mise en scène de la cérémonie de Bois-Caïman, où
tous les clichés sur la religion vaudou étaient réunis; Avec ce côté voyeur à l’égard
des phénomènes de transes et de possessions, qui ne sont pourtant pas propres
au seul vaudou, mais que l’on retrouve par exemple chez protestants américains,
les « Quaker ».
La révolution haïtienne est sœur
de la révolution française de 1789. Bois-Caïman, c’est la prise de la Bastille.
Et parmi les révolutionnaires haïtiens, il y a des figures comparables à celles
de Mirabeau, Danton, Robespierre, Napoléon. Ce sont Toussaint-Louverture, mais aussi Dessalines, Pétion, Christophe. Leurs débats, leurs oppositions,
leurs luttes sont du même ordre: Luttes pour le pouvoir, intérêts
personnels, oppositions idéologiques: "Pas de liberté pour les ennemis de la Liberté", Girondins contre Montagnards. Avec les mêmes grandeurs, les mêmes horreurs, les mêmes erreurs.
Il est dommage que France Télévision n’ait pas pensé
faire appel aux grands textes déjà écrits sur la révolution haïtienne,
Toussaint Louverture ou d’autres.
Il y a eu Victor Hugo, le grand
écrivain cubain Alejo Carpentier, plus récemment Aimé Césaire, Aimé Césaire
dont la pièce « La Tragédie du Roi Christophe », inscrite au répertoire
de la Comédie-Française, décrit en fait la tragédie d’Haïti, première
République noire, mise au banc des nations pendant près d’un siècle. Il y a
aussi les textes des haïtiens eux-mêmes, sur eux-mêmes: «Gouverneur de la Rosée »
de Jacques Roumain, ou
«Romancero aux étoiles » de Jacques-Stephen Alexis. Parce que les haïtiens depuis deux cents ans parlent et écrivent sur
leur Histoire, avec un grand H, mieux que nous, et dans notre langue. C’est
dingue, non ?
Alors un conseil, allez chercher
ces grands auteurs, et écoutez en boucle une des chansons de l’actrice et
chanteuse Toto Bissainthe: « Ayiti, sé Manman libétè. Si’l tonbé , l’al lévé » « Haïti
est mère de la Liberté. Même si Haïti tombe à terre, elle finira par se relever ».
Nous vivons une e-poque
formidable
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