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mardi 9 juin 2009

CHRONIQUE D'UNE MORT ANNONCEE...

C’est la chronique d’une mort annoncée. Non pas celle d’Omar Bongo, mais celle de la fameuse «Françafrique »
On savait que le dictateur gabonais était atteint d’un cancer. Quant à son régime: Le « bilan » de ses 41 ans de pouvoir a déjà été fait et il est tragique: Le Gabon compte moins d’un million d’habitants, il a les ressources et les recettes pétrolières d’un émirat, mais ses habitants n’ont plus que leurs yeux pour pleurer, non pas leur Président défunt mais surtout leur misère, une des plus grandes d’Afrique, leur analphabétisme, leur mortalité infantile.
La mort annoncée, c’est donc surtout celle de la « Françafrique », que l’on ressort dans ce genre de circonstances, notamment pour ironiser sur les condoléances officielles de la France où il est dit qu’« on est ému », que « la France a perdu un ami »… Il fallait faire quoi ? Sarko et Kouchner devaient-ils prendre des accents à la Eva Joly ?
Et ressortent également les « révélations » sur le financement de tel parti politique ou de telle campagne électorale. Et quand en plus ces "révélations" émanent d'un ancien Président de la République, qui avait été accusé, à tort bien sûr, d'avoir croqué du diamant de Centrafrique, on a envie de se pincer!!!
Car il faut être clair: Tout le monde s’est sucré, non seulement au Gabon mais dans toute l’Afrique. Les grandes sociétés, oui, mais également tous ces « expats », ces « conseillers » payés dix fois plus qu’en France, ces enseignants aux conditions de vie d’ambassadeur, ces « cadres » qui auraient fait des carrières minables en France et qui grâce au fric qu’ils se faisaient là-bas se finançaient leurs maisons pour leurs retraites en Corse ou en Bretagne, ces maisons d’édition qui ont publié des livres, des BD à la gloire des dirigeants corrompus, ces journalistes qui ont écrit des « publireportages », ces cabinets immobiliers qui ont vendu maisons et appartements.
Nous sommes tous complices, alors à qui doit-on commencer à couper la tête ?
D’autant que, comme d’hab, nous sommes en retard de plusieurs batailles. Nous jouons aux chevaliers blancs alors qu’il n’y a plus de combattants, que la messe est dite et que le vin, en l’occurrence, le pétrole est déjà tiré et que cela fait au moins une décennie que la «Françafrique» a commencé à mourir.
La France en a fini avec une politique qui ne faisait que prolonger l’époque coloniale. Et ce n’est pas par générosité, par morale ou par amour profond de l’Afrique et de ses habitants. C’est par intérêt. Les intérêts de la France ne sont plus, ou tellement peu, en Afrique.
Sur le plan militaire, les dés sont également jetés avec la fermeture des bases en Afrique, l’ouverture d’une base à Abu Dhabi.
L’opération « Licorne » en Côte d’Ivoire dont le but était beaucoup plus d’éviter la guerre civile que de défendre des intérêts économiques français, aura été la dernière de ce genre, montrant qu’en Afrique la France n’avait que des coups à recevoir et en plus en se faisant cracher à la figure son passé colonial. Alors…
L’avenir de l’Afrique, sans la France et sans la « Françafrique » sera-t-il plus rose ?
A court terme, ce n’est pas sûr. Lorsque ce ne sont plus les français qui viennent faire de l’argent sur le dos de la misère, ce sont les américains, dont l’Ambassade flambant neuve en Côte d’Ivoire est deux fois plus grande que celle de la France, pétrole oblige ; Ce sont les chinois, les brésiliens; Ce sont toutes ces grandes compagnies qui préfèrent travailler « off-shore » plutôt que de s’impliquer dans les régimes des pays dont elles exploitent les richesses.
Sur le plan de la démocratie et des libertés, si les régimes parfois grotesques, souvent brutaux, toujours corrompus, s’effondrent les uns après les autres, à quoi cèdent-ils la place ? A pas grand-chose de mieux. Parce que les sociétés « civiles » ont été assommées par la pauvreté et le sous-développement. Parce que ces Etats n’ont que l’apparence d’Etat «à la française» (l’hymne national, le drapeau, le palais présidentiel etc…) mais ne sont en fait que l’expression de clans qui se partagent les recettes. Parce qu’il est facile de jeter de l’huile sur le feu pour attiser les «rébellions » entre clans, entre groupes armés, équipés et financés grâce à l’argent du pétrole, du bois, du diamant, du cuivre, du café. C’est ce qui se passe sans fin depuis son indépendance dans le plus grand et le plus riche des pays francophones, le Congo ex-belge, ex-Zaïre,
Le pire n’est cependant pas une fatalité. Quelques pays s’en sortent:
Comme le Sénégal qui est malheureusement un des pays les plus pauvres, qui a le moins de ressources naturelles et dont la situation économique s’est beaucoup dégradée. Paradoxalement, c’est peut-être ce qui explique qu’il soit le moins instable politiquement. Je suis pauvre, donc je n’intéresse personne et on me laisse tranquille ! Mais ce serait peut-être faire injure à l’intelligence des Sénégalais, y compris des plus modestes.
Comme au Ghana qui, après des années de dictatures, de coups d’état et de conflits, vit un formidable renouveau démocratique accompagnée d’une grande liberté de presse. Comme quoi on peut être pauvre et sous-développé et aspirer à la démocratie et la liberté !
Une fois la « Françafrique » liquidée, il faudra peut-être que la France songe à revenir en Afrique. A redéfinir ses relations, ensemble avec les autres européens, avec ce continent bientôt peuplé d’un milliard d’habitants auxquels nous attachent tant de liens, notamment ceux de la population et de l’immigration, et même, ceux de la culture et de l'histoire partagées.

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