« La violence constitue à la fois
un des pires maux de notre époque et un de ceux contre lesquels la Grèce
antique s’est élevée avec le plus de force. (…)
En ces jours où l’on parle
beaucoup de la Grèce, il n’est pas inintéressant de relire les textes de celles
et ceux qui sont des vrais connaisseurs et des « passeurs » de la
Grèce antique. Comme Jacqueline de
Romilly, qui passa sa vie à essayer de nous faire comprendre la modernité
des textes, des réflexions, des athéniens 500 ans avant Jésus-Christ.
Attention, Jacqueline de Romilly
ne faisait pas de copié-collé entre la Grèce antique et la Grèce moderne.
Et les raccourcis du
style :« La Grèce a inventé la démocratie » sont totalement
faux: L’on s’imagine un régime parlementaire avec des habitants tous
égaux, libres de choisir. Alors, que la Grèce antique, ce sont les femmes et les
esclaves exclus de la société.
Quant à la Grèce moderne, elle
ne connaît la démocratie moderne que depuis à peine 40 ans. Un peu comme
l’Espagne et le Portugal. La mère de nos démocraties, c’est plus l’Angleterre
que la Grèce.
En revanche, oui, il s’est passé
quelque chose qui influence notre civilisation, dans ce petit bout de
territoire de rien du tout, pas toute la Grèce, mais Athènes, 450 ans avant
Jésus-Christ:« Le V° siècle athénien
a inventé la démocratie et la réflexion politique. Il a créé la tragédie et, en
moins de cent ans, a vu se succéder les trois seuls auteurs qu’ait connus la
postérité –Eschyle, Sophocle, Euripide. Il a donné forme à la comédie avec
Aristophane. Il a vu l’invention de l’histoire, avec Hérodote (…) puis
Thucydide. Il a vu les constructions de l’Acropole et les statues de Phidias.
Il a été le siècle de Socrate. Socrate, dans les dernières années du siècle,
s’entretenait avec le jeune Platon ou le jeune Xénophon, et avec les disciples
de ces sophistes, qui venaient d’inventer la rhétorique. On apprenait alors les
progrès d’une nouvelle médecine, scientifique et fondée sur l’observation –
celle d’un certain Hippocrate. (…) Il s’est donc passé quelque chose, en ce V°
siècle avant J.C, qui allait au-devant de l’intelligence et de la sensibilité
humaines (…) Il faut se demander ce
qu’il pouvait y avoir en Grèce, dés l’origine et jusqu’à la fin, qui mette
ainsi à part la civilisation grecque et lui assure ce rayonnement sans pareil… »
(1)
La Grèce antique a connu la violence, bien entendu. Elle l’a connue
sous toutes ces formes. Elle a connu une interminable série de guerres ;
et au cours de chacune d’elles, on rencontre des mesures de répression, qui
nous paraissent effroyablement cruelles. (…)
La Grèce a connu la violence (…) mais elle a condamné la
violence : toute la littérature du temps l’atteste. Et peut-être est-ce
précisément parce qu’elle en a fait l’expérience qu’elle a pu exprimer avec
tant de force son refus et son désir de l’abolir (…)
Les Grecs ne nous ont pas offert un modèle qu’il s’agirait
d’imiter : ils ont décrit une expérience et défendu certaines valeurs
qu’ils étaient les premiers à découvrir et qu’ils ont exprimées avec une telle
netteté et un tel sens de l’universel que celles-ci s’imposent encore à nous,
comme si celles étaient actuelles.(…) Dans les classes, pour les jeunes, quand
il s’agit de leur inculquer, le plus possible, tout ce qui pourra faire reculer
la sombre violence dont nous souffrons, il faudra plutôt former leurs jeunes
années avec les auteurs antiques ou classiques. Les auteurs les plus modernes
leurs seront toujours connus par le contexte du présent (…) Mais on peut
espérer que la lecture d’autres textes aidera à fortifier en eux le dégoût de
la violence, et à laisser croître dans leur sensibilité des forces de
résistance. Il faut à tout prix leur communiquer un peu de cette sève et de cet
élan que nous avons perdu. (…)
Je n’imagine certes pas que la
littérature soit le premier remède contre la violence, ni le plus efficace.
(…)Mais l’aide de la littérature, l’aide de l’enseignement, l’aide des textes,
l’aide de la Grèce, pourquoi s’en priver ? Elle est là, réconfortante et
lumineuse, capable de nous aider, et à portée de notre main… »(2)
Les grecs anciens pour nous
aider à lutter contre la violence dans nos sociétés modernes ? Dommage que
la réforme de l’enseignement les fasse passer à la trappe !
Nous vivons une e-poque
formidable !
(1) Pourquoi
la Grèce ?
(2) La Grèce
contre la violence
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