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Opération "Lavage intégral" , vue par les caricaturistes |
C’est la semaine, le mois de tous les dangers pour Dilma
Rousseff. Tous les appuis de l’actuelle Présidente du Brésil fondent aussi
sûrement que neige au soleil. Et au Brésil, il y très peu de neige et pas mal
de soleil.
Le coup de grâce vient d’être porté par ses
« alliés » de la coalition au pouvoir qui regroupe son parti, le PT,
le Parti des Travailleurs, celui de l’ancien Président Lula, et plusieurs
partis centristes.
Début mars, c’était d’abord le Président du Parlement,
Edouardo Cunha, qui apprenant que malgré son immunité parlementaire il serait
quand même prochainement jugé pour corruption, approuvait la procédure de
destitution de la Présidente. La justice reproche en effet à Dilma Rousseff et
à son parti d’avoir truqué les comptes publics pour gagner les dernières
élections.
Depuis hier, c’est au tour du Vice-Président Michel Temer.
Il annonce qu’il est prêt à exercer l’intérim en cas de destitution de Dilma
Rousseff et son parti, le PMDB ( 69 députés, 7 ministres ) vient de décider de quitter la coalition. La
voie paraît donc être ouverte pour la destitution de la Présidente qui pour
être prononcée doit être approuvée par 2/3 des députés. Ironie de
l’histoire : Le PMDB est lui aussi éclaboussé par la corruption. On se
demande d’ailleurs qui dans la classe politique va échapper à l’opération
« Lava jato » - une
expression utilisée pour le lavage automatique des voitures, quelque chose
comme « opération Kärcher », engagée par la Justice fédérale, la police
fédérale et la Cour Suprême. Un des symboles de cette nouvelle indépendance et
pugnacité de la justice au Brésil, le « petit juge » de province,
Sergio Moro, qui a été le premier à dévoiler les ramifications spectaculaires
de la corruption. Et notamment l’importance des pots de vin versés par la
première compagnie brésilienne, Petrobras, la société nationale du Pétrole.
Sont également concernés les très nombreux groupes de travaux publics, qui ont
copieusement arrosé par exemple pour obtenir les grands chantiers d’infrastructures,
ceux de la Coupe du Monde ou même des Jeux Olympiques. Ce sont des dizaines de
PDG, de députés et de ministres qui sont aujourd’hui poursuivis, mis en examen,
emprisonnés.
Jusqu’à l’ancien Président Lula, dont on découvre qu’il est
loin d’être un saint et que son passé d’ouvrier syndicaliste de la métallurgie
n’était pas une garantie d’honnêteté et de vaccin contre le goût du luxe. Pour
tenter de le sauver de la case prison, la Présidente Dilma Rousseff a
maladroitement aggravé encore un peu plus son cas en tentant de le nommer chef
de cabinet de la Présidence, équivalent de Premier ministre. Un tour de passe
passe qui n’est pas passé, sa nomination a été retoquée.
Ses partisans, les sympathisants du Parti des Travailleurs,
crient au complot politique, à un coup d’état, à une déstabilisation ourdie par
la droite et les milieux d’affaire. Mais ils ne sont guère entendus, sauf à
l’étranger, en France notamment, où certains, toujours sous le charme du
merveilleux conte de fée tropical « Lula
l’ouvrier devenu Président », relaient cette théorie du complot. Mais
cela ne tient pas: Un temps inquiets par l’ancien syndicaliste, les milieux
d’affaire ont été ravis et bien servis par la Présidence Lula. Ils ont
formidablement profité de la croissance de l’économie qui a fait du Brésil la 7 ème économie mondiale, et intégré plus de 40 millions de
brésiliens dans les classes moyennes, donc dans les circuits de consommation.
Les opposants sont eux aussi de plus en plus nombreux dans
la rue, scandant cette phrase de Lula, du temps où il était de gauche : « Au Brésil, quand un pauvre vole, il va en
prison ; quand un riche vole, il est nommé ministre ».
Tout cela sur fond d’une crise économique sans
précédent : En deux ans, tous les clignotants sont passés au rouge:
Récession, - 3, 8 % de croissance économique -, inflation, explosion du chômage.
On se demande s’il y a encore un pilote à la tête du Brésil.
Pourtant cette crise brésilienne pourrait avoir un bon côté;
Elle est le signe du formidable bond en avant vers la démocratie. On ne fera
plus gober aux brésiliens n’importe quel bobard. Et ils ne se contenteront plus
de carnaval, d’une Coupe du monde de « futebol », ni de Jeux
Olympiques pour qu’on les arrête sur le chemin qui mène à un Brésil plus
propre. Or l’un des principaux freins au développement du Brésil, dénoncé par
la Banque Mondiale, le FMI, ou Transparency International, c’est justement la
corruption, le manque d’efficacité d’une administration corrompue. Avec le
« lava jato » qui est en
cours, le Brésil est peut-être en train de franchir une étape décisive qui le
fera sortir de cet état de géant au pied d’argile qu’il y a un siècle Georges
Clémenceau décrivait ainsi : « Un
pays d’avenir qui le restera longtemps ». Les brésiliens aujourd’hui
ont envie que leur avenir de géant mondial devienne enfin leur présent.
Nous vivons une e-poque formidable !
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