De Johnny à Booba: Une simple question de générations ? |
C’est
une conversation saisie au vol dans un supermarché, entre le rayon fromages et
celui des yaourts à l’heure où se déroulait l’hommage à Johnny.
L’une :
Quand je pense que je suis obligée de
faire le réassortiment. Je préfèrerais être à la Madeleine.
L’autre :
Et tu y aurais fait quoi ? Il est
dans un cercueil.
Un
troisième : Et tu aurais rien vu,
c’est blindé de monde.
La
première (vraiment fâchée) : C’est
mon idole. J’ai vieilli avec lui.
L’autre :
Moi je préfère Sardou.
Un
autre : Pfuiittt, moi j’écoute pas
ça, je préfère le hip hop. Et Booba
Toute
la France rendait hommage à Johnny. Les scènes à la télé étaient
impressionnantes. Des centaines de milliers, un million de personnes. L’hommage
était plutôt bien. Pas de couacs. De vraies émotions, une belle cérémonie. Le
Président a joué son rôle, discours à l’extérieur de l’église, pas de signe de
croix avec l’eau bénite. Ses gestes étaient scrutés, la laïcité a été
respectée.
Toute
la France donc, était là. Même ceux qui n’auraient pas voulu. Parce qu’il était
difficile d’y échapper. Tous les media diffusaient en direct la cérémonie, et en
boucle des spéciales, des rétros, des témoignages. A moins d’être en voyage au
fin fond du Rajahstan ( par exemple, mais on pouvait simplement aller en
Allemagne ou en Espagne) , difficile d’échapper à Johnny. De résister à la
tentation de cliquer sur un exclusif, sur les 5 choses que vous ignorez sur
Johnny, sur « Et pourquoi il a choisi Saint-Barthélémy ? ».
Tiens
voilà une décision qui divise.
D’un
côté les fans qui auraient aimé pouvoir aller en pèlerinage sur sa tombe comme
pour Dalida, Jim Morrison ou Claude François. Et Saint-Barthélémy, ça fait nettement
plus cher que Dannemois dans le 91. De l’autre, il y a ceux qui trouvent ça
très bien, c’est « comme Brel, enterré aux Marquises ». Ceux-là
apparemment ne connaissent ni les Marquises, ni Saint-Barth, le seul point
commun entre les deux, étant d’être des îles. Mais l’une naturelle et
authentique et l’autre bétonnée et jet-setisée.
Toute
la France était donc là . Sauf celle qui sur Deezer, Instagram, snapchat ou
Booska se rue sur le dernier album de Booba, disque d’or en une semaine grâce
au téléchargement.
Booba
dont on vante le « flow » et les punchlines qui ne cessent de mettre
sur un « Trône » un machisme bodybuildé, mysogine et homophobe.
De «
J'mets la capote sur ma bite et sur ma
Lamborghini » à
« J'vais bien t'baiser et t'auras pas à lâcher
une thune
T'es témoin d'un mariage gay entre une Kalash' et une plume
T'en as deux, une dans la bouche et l'autre dans le croissant de lune ».
T'es témoin d'un mariage gay entre une Kalash' et une plume
T'en as deux, une dans la bouche et l'autre dans le croissant de lune ».
On
est loin de Oh ! Marie…
On
est loin de Johnny. Comme si ce n’était pas le même siècle, la même France.
Ces
derniers jours, la France du XXI ème siècle semblait absente de ces moments d’émotion
nationale. Comme elle l’était aussi en partie dans les manifestations après les
attentats il y a deux ans.
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