Il neige. En quelques jours, plus d’un mètre, avec des températures
très douces, et beaucoup de vent : Toutes les conditions sont donc réunies
pour que « le manteau neigeux soit
instable ». Un gardien de refuge, habitué de la montagne a même été
pris dans une coulée. Et pourtant… Pourtant, vous trouvez toujours des petits (
et même des grands) cons qui se la jouent: « Sensations-Liberté-Adrénaline »,
et vont sciemment skier « hors piste », à leur risque et péril,
certes, mais aussi au risque et péril des pisteurs et secouristes, qui vont leur
venir en aide, au cas où.
C’est le syndrome « Man vs
wild » « Glisse extrême ». Parce que nous vivons dans des
environnements où le risque doit être zéro, où dés qu’un train déraille, un
vélo tombe, un piéton glisse, c’est forcément la faute à… aux pouvoirs
publiques, nous jouons à nous faire peur : Ouh ! je traverse hors des
clous ! Et en montagne, cela
veut dire, hors des pistes.
En 30 ans, la pratique du ski s’est fortement démocratisée même
si elle reste quand même un luxe: équipement, forfait astronomique, frais de
séjour qui grimpent avec l’altitude. Les techniques d’apprentissage ont
également rendu le ski plus accessible: Matériel plus léger, skis plus larges
paraboliques, hyperboliques, qui « skient » presque tous seuls sur
des pistes dammées comme des boulevards. Résultat: En temps normal, nous sommes
tous des champions, nous confondons souvent vitesse avec « je sais
skier », montagne avec liberté. Dés que les conditions se compliquent, une
piste gelée par exemple, du brouillard, de fortes chutes de neige, là il n’y a
plus personne: Je ne contrôle plus ma trajectoire, je deviens un danger pour
moi-même et aussi pour les autres. Il en va de même pour les courses en
montagne, pour l’alpinisme. Beaucoup confondent la vraie montagne avec des murs
d’escalade, et le ski avec de la glisse en zone urbaine.
Or, même si elle a été équipée, voire suréquipée, la
montagne reste un environnement naturel sauvage, où l’homme n’est qu’un invité
et c’est très bien ainsi.
Lorsque dans les années 1960, l’Alpe d’Huez a
ouvert le 3ème tronçon, le téléphérique du Pic Blanc, un panneau
avait été installé devant lequel aujourd’hui les skieurs passent sans même y
prêter attention : « Skieurs, attention ! Ici, commence le
domaine de la Haute Montagne ». Apprendre à skier ce devrait être
apprendre la montagne. Ses règles, son climat, ses sautes d’humeur. Les
montagnards ont mis des siècles à adapter leur mode de vie à leur environnement.
Où construire leurs chalets, leurs églises par exemple en tenant compte de
coulées de neige, de chutes de pierres, de glissements de terrain qui ne se produisaient que tous les
vingt, cinquante ans, voire tous les siècles. Il a fallu la catastrophe du
chalet de l’UCPA à Val d’Isère en 1970, 39 morts dans une avalanche
« centenale », puis
quelques semaines plus tard, celle du plateau d’Assy, 71 morts dans une coulée
de boue qui a emporté un sanatorium pour enfants installé depuis…1929. pour
que soit mise en place les zonages risque naturel montagne puis les plans de
prévention de risques naturels.
« Que la montagne est belle » chantait Jean
Ferrat. Mais il aurait pu ajouter qu’elle n’est pas seulement un paysage, mais
aussi une culture de vie qui devrait s’apprendre, qui devrait être transmise.
Et cela prend forcément plus de temps que d’apprendre à glisser. Dans ce
domaine aussi, notre système d’éducation laisse à désirer.
Nous visons une e-poque formidable.
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